L’homo oeconomicus au travail
Comme vous pouvez le deviner, homo oeconomicus est un terme qui signifie “homme économique” en latin.
Économique dans tous les sens du terme, que ce soit dans le fonctionnement cognitif, la prise de décision ou encore l’économie de temps, l’homo oeconomicus est un être rationnel et maximisateur selon le modèle néoclassique en économie qui représente théoriquement le comportement de “l’homme économique” comme un comportement d’utilisation optimale des ressources rares pour atteindre une fonction objective dite de fonction d’utilité.
Cette fonction d’utilité mène l’économiste à ne pas forcément chercher de sens large dans ce qu’il fait.
“Nous ne sommes pas des Homo Oeconomicus. Signé : Homo Sapiens”. Que répondre à Homo Sapiens ?
Doit-on réellement opposer l’homo oeconomicus à l’homo sapiens ?
L’homo oeconomicus n’est-il pas un homo sapiens à la base ?
La vraie question serait : “quel sens a été donné à l’économie pour en arriver à créer des homo oeconomicus aujourd’hui ?
Qui dit économie dit travail. Qu’est-ce que le travail aujourd’hui ? Comment l’interprétons-nous ?
Le travail n’a pas toujours été une partie de plaisir pour l’humanité.
Bien des gens ont souffert des labeurs qui ont été imposées dans le passé.
Nous avons été obligés de travailler dur dans des champs agricoles pour assouvir nos besoins naturels.
Aujourd’hui, la technologie a transformé et continue de transformer notre travail en supprimant des emplois et en en créant de nouveaux.
Mais ce qu’elle fait surtout c’est transformer nos vies en faisant ressortir en chacun de nous de “nouveaux besoins” qui sont le reflet de l’évolution de notre espèce tant dans le domaine psychologique que physique (acquisition de nouvelles compétences).
Que sommes-nous si nous ne donnons pas de sens à ce que nous faisons ?
Qui sommes-nous si le sens de notre travail n’est pas sensé ?
La technologie peut nous rendre heureux comme malheureux.
Le pouvoir de notre bonheur est encore entre nos mains.
Elle reste un outil, c’est l’utilisation qu’on en fait et le sens qu’on lui donne qui nous apporte le bonheur. Comme le sens que l’on donne à notre vie et à notre travail.
Se définir a toujours été très difficile pour l’Homme car nous changeons en permanence à travers ce que nous traversons et ce que nous vivons.
Nos ressentis, nos connaissances évoluent et nous évoluons en conséquence.
Revenons-en au sens donné au travail qui est étroitement lié à la notion d’engagement.
Aujourd’hui, la perception que nous avons de la notion d’engagement n’a pas vraiment évolué, la réalité est tout autre.
En effet, l’engagement résonne toujours à travers une connotation militaire dans nos esprits. Nous avons l’impression qu’un retour en arrière est difficile voire impossible lorsque nous nous engageons. Cette impression est la conséquence de nos croyances sur l’engagement.
La réalité est que chez la plupart d’entre nous, l’engagement découle d’une motivation personnelle et/ou professionnelle, d’une prise d’initiative et d’une autonomie.
De nos jours, l’engagement n’est plus communautaire mais humanitaire. Lorsque l’engagement ne s’oppose plus à la liberté mais au contraire devient notre liberté, nous pouvons l’inventer et le personnaliser.
Et devinez quoi, l’engagement pourrait favoriser l’intelligence collective.
Selon le sociologue et philosophe Pierre Lévy, auteur de L’Intelligence collective pour une anthropologie du cyberespace, l’intelligence collective est « une intelligence partout distribuée, sans cesse valorisée, coordonnée en temps réel, qui aboutit à une mobilisation effective des compétences ».
Elle est la « capacité à maximiser la liberté créatrice et l’efficacité collective ». Cette phrase ne vous fait pas penser à quelqu’un ?
Paradoxalement, elle me fait penser à l’homo oeconomicus, l’être rationnel et maximisateur.
On remarque une distinction subtile à ne pas négliger : le sens.
L’intelligence collective ne peut se créer sans un sens large que l’on donne à nos idées et actions.
En plus de ne pouvoir se construire sans sens elle apporte au fur et à mesure un sens pour nous tous et chacun d’entre nous.
L’intelligence collective peut servir de base solide pour l’élaboration d’une nouvelle culture d’entreprise ainsi que d’une organisation de celle-ci, sans oublier l’innovation qui est très demandée par les salarié(e)s et les dirigeant(e)s.
Une culture managériale fondée sur la confiance, la coopération, la compétence et l’adhésion peut devenir l’avenir d’un système de travail qui respecte l’individu et met en avant son bien-être.
“La démocratisation du travail passe par des procédures de prise en compte des aspirations de chacun, d’échange contradictoires, de règlement pacifié des désaccords et de construction d’un avenir commun.”
L’intelligence collective permet à tout le monde dans une organisation de travail de participer au processus de création de valeur.
Comme l’exprimait Edward Bulwer-Lytton (homme politique et romancier britannique), « le dialogue véritable consiste à s’appuyer sur l’idée de son interlocuteur, non à la démolir », ce qui reflète l’intelligence collective.
Vous l’aurez compris, le véritable enjeu de l’homo sapiens et de l’homo oeconomicus reste et sera de donner du sens au travail, un sens qui évolue et évoluera avec nous, selon nous et malgré nous.
Que ce soit dans notre vie personnelle ou au travail, nous restons des êtres humains. Nous ne nous transformons pas en robots dans notre milieu de travail comme le souhaiteraient certains lobby.
Nos émotions ne nous quittent jamais, elles sont en quelque sorte la clé de notre survie.
Alors pourquoi essayer de les ignorer, de les supprimer au travail tandis que nous pouvons apprendre à les contrôler et à les utiliser comme potentiel de
productivité ?
Les recherches en psychologie des émotions et neurobiologie démontrent que les compétences de régulation émotionnelle comme la gestion de ses propres émotions, la gestion des conflits dans les organisations, la prise de décision, la gestion du changement sont liées à la santé physique et mentale des personnes et elles le sont aussi à la faculté à gérer des relations humaines, à prendre des décisions et à la capacité à faire preuve de leadership.
L’intelligence émotionnelle est un facteur clé jouant un rôle déterminant dans la pratique du management.
Notre société a longtemps considéré les émotions comme une faiblesse dans le monde du travail, mais il s’avère qu’elles apparaissent aujourd’hui comme une des compétences indispensables pour un management de qualité qui s’adapte à un environnement en constante évolution.
Si vous utilisez votre intelligence émotionnelle, vous ne le regretterez pas !
Elle peut favoriser l’expérimentation de “l’état de flow” identifié par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi comme un “état où l’on vit une expérience optimale” c’est-à-dire un état où l’on est totalement immergé dans une activité, ce qui provoque un bonheur et un bien-être de haut niveau.
En adaptant le travail à soi et non l’inverse, on peut découvrir des potentiels inexploités qui nous réservent bien des surprises et qui pourraient changer la donne en matière de qualité de vie de travail.
Avez-vous entendu parler de “l’effet Dunning-Kruger” ?
Comme le décrit si bien Coline De Silans dans un article de Welcome to the Jungle, “l’effet Dunning-Kruger” aussi appelé “effet de surconfiance” est un biais cognitif constaté quand des personnes peu qualifiées sur un sujet sont persuadées d’être très compétentes, alors que celles qui sont les plus qualifiées ont au contraire tendance à se sous-estimer.
Suite à une enquête menée sur un groupe d’étudiants, les psychologues David Dunning et Justin Kruger démontrent que les plus doués d’entre eux ont eu tendance à se sous-évaluer, tandis que les moins qualifiés se sont clairement surestimés.
Comment expliquer cet ‘effet de surconfiance” se manifestant chez les personnes les moins compétentes ?
Selon Dunning et Kruger, moins la personne possède de compétences, moins elle est à même de savoir qu’elle est ignorante.
“L’incompétence qui les mène à faire de mauvais choix est celle-là même qui les prive de la capacité à reconnaître la compétence, que ce soit la leur ou celle de toute autre personne” (Dunning et Kruger).
A votre avis pourquoi cet effet existe-t-il ?
Selon moi, la pression sociale peut nous pousser à manifester des comportements trompeurs.
Nous avons tendance à penser culturellement qu’une personne ayant confiance en elle est forcément compétente.
Cette confusion mène à des injustices dans les milieux de travail comme une promotion qui n’a pas lieu d’être.
La vraie question est : Êtes-vous certains de vous évaluer à votre juste valeur ?
Pour en être sûre il faut apprendre à se connaître un peu plus chaque jour, tout en s’intéressant à des domaines qui nous sont inconnus afin d’élargir notre sphère de compétences et de connaissances pour ne pas oublier d’être conscient de notre ignorance. 😉
Pour accéder à l’article cliquez sur le lien suivant : https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/effet-duning-kruger-competence-reussite
PS : Si vous voulez en savoir plus sur toute cette histoire, je vous conseille le livre de Daniel Kahneman “Système 1 Système 2, Les deux vitesses de la pensée”, Prix Nobel d’économie.